Soutenance prévue le 31 mars 2021
Rapporteurs :
- Jean-Marc Delort (Sorbonne Paris Nord)
- Daniel Tataru (Berkeley)
- Maciej Zworski (Berkeley)
Les trois rapports d’habilitation sont disponibles ici : Rapports_HDR
Jury : Hajer Bahouri, Nicolas Burq, Jean-Marc Delort, Frank Merle, Christopher Sogge, Daniel Tataru, Nikolay Tzvetkov et Maciej Zworski.
De nombreux phénomènes physiques de type ondes sont modélisés par des équations aux dérivées partielles d’évolution. Je m’intéresse aux équations aux dérivées partielles de type ondes dans des milieux inhomogènes, dont les solutions admettent des propriétés de propagation permettant l’utilisation de méthodes issues de l’optique géométrique pour répondre aux questions qui se posent. Je souhaite comprendre comment la géométrie du milieu, et surtout la présence d’un bord (ou d’une interface) peuvent influencer la dispersion et la concentration des ondes et quel type d’ondes peut saturer les estimations correspondantes. Il s’agit donc d’étudier les interactions entre ces différents paramètres et leur effet sur les solutions: l’influence du bord se manifeste par des trajectoires de rayons lumineux qui peuvent se réfléchir au bord et engendrer des caustiques en très grand nombre (on ne cherche pas ici à définir précisément la notion de caustique : il s’agit d’un lieu où l’intensité lumineuse est singulièrement intense.) Comprendre ces questions est fondamental, notamment pour des questions théoriques liées à l’ergodicité quantique et à la localisation des fonctions propres du Laplacien, et également pour nombre d’applications pratiques (les deux facettes se rejoignent, par exemple quand on étudie la propagation dans une fibre optique où l’objectif est d’éviter de brûler la fibre tout en maintenant une excellente propagation sur de longues distances.)
Ainsi, je suis amenée à étudier des estimations mesurant la concentration ou l’étalement de fonctions propres, de quasimodes, et de solutions d’équations d’ondes, ainsi que des estimations de type dispersion / Strichartz en espace-temps, qui représentent des outils fondamentaux pour l’étude de modèles nonlinéaires. Intuitivement, on peut comprendre que l’énergie d’une onde suit les rayons lumineux, et ce phénomène peut être quantifié par des théorèmes dits de propagation des singularités, où la mesure est, naturellement, faite en norme L^2 localisée convenablement le long du flot dans l’espace des phases (de sorte que la “propagation des singularités” devient quantitativement la propagation de la régularité localisée en espace et en fréquence.) A contrario, la mesure de la dispersion d’une onde nécessite une information sur l’amplitude de l’onde aussi précise que possible (L^1, au mieux, en tout point de l’espace-temps), le taux de décroissance temporel de cette amplitude mesurant la dispersion et pouvant être relié, heuristiquement, à l’écartement des rayons.
Obtenir des estimations de dispersion optimales dans des domaines compacts nécessite d’abord de comprendre les phénomènes de concentration des fonctions propres qui peuvent apparaître près du bord. En effet, on peut envisager qu’une perte dans la dispersion est liée à la présence des caustiques, qui apparaissent lorsque des rayons optiques envoyés d’une même source (sous différents angles) cessent de diverger. D’autre part, pour montrer des estimations optimales pour les fonctions propres (ou les projecteurs spectraux), il est indispensable de comprendre le rôle joué par la géométrie du bord dans la façon dont les rayons se réfléchissent et se re-concentrent.
La plupart des équations de type ondes (hyperboliques, Schrödinger, KdV et autres modèles dispersifs non-linéaires) issues de modèles physiques représentent des phénomènes dans un milieu qui n’est que rarement homogène, et encore moins souvent infini. Près d’un demi-siècle a été nécessaire pour répondre à des questions simples sur des modèles jouet d’équations nonlinéaires où le milieu ambiant était le vide (l’espace entier avec une structure métrique plate). Ce n’est que récemment que l’influence de la géométrie du milieu a fait son apparition, à travers l’étude en géométrie courbe, éventuellement compacte, peu régulière, des traditionnels modèles « jouet » non-linéaires. Ainsi, des développements récents ont permis de mieux comprendre les géométries courbes et les milieux inhomogènes, mais le plus souvent en l’absence de bord (ou d’interfaces entre deux media avec conditions de transmission), qui sont pourtant bien souvent les seules situations physiques réalistes (penser à la tranche d’une fibre optique multi-coeur).
Thèse de doctorat (soutenue le 19 juin 2009 à Orsay) :
Dans ma thèse, je me suis intéressée à l’étude des propriétés des solutions des équations aux dérivées partielles hyperboliques. Plus précisément, mes travaux portent sur les inégalités de type Strichartz pour les solutions des équations des ondes et de Schrödinger sur des variétés à bord. De nombreux auteurs se sont intéressés à l’étude du problème de Cauchy pour de telles équations. Pendant longtemps, des résultats ont été obtenus dans le cas où le domaine était R^d : en effet, des formules explicites sont alors disponibles pour l’étude du semi-groupe d’évolution linéaire et elles permettent d’établir une large classe d’estimations à priori : inégalites de Strichartz ou effet régularisant (pour l’équation de Schrödinger dans ce dernier cas). Plus récemment, ces techniques ont pu être développées dans le cas des géometries non triviales. Cependant, la situation reste loin d’être aussi bien comprise que dans le cas de R^d…
Dans ma these j’ai montré que les estimations de Strichartz usuelles sont fausses pour l’équation des ondes sur un convexe strict, en raison de phénomènes microlocaux lies aux caustiques générées en temps arbitrairement petit près du bord. Pour l’équation de Schrödinger sur des domaines extérieurs j’ai obtenu des estimations d’effet régularisant précise au voisinage du bord, à l’exterieur d’une boule de R^3 qui m’ont ensuite permis d’obtenir un résultat d’existence globale pour l’équation de Schrödinger cubique à l’exterieur d’un nombre fini de boules de R^3 satisfaisant l’hypothese d’Ikawa. J’ai ensuite obtenu des inégalités de Strichartz optimales pour l’équation semi-classique sur le billard de Sinaï et j’ai déduit de cela les mêmes estimations de Strichartz que dans le cas plat pour l’équation de Schrödinger classique à l’extérieur d’un convexe strict de R^d. Enfin, dans le cas de l’extérieur d’un obstacle non-captant, nous avons montré, en collaboration avec F.Planchon, que l’équation de Schrödinger quintique (H1 – critique) est bien posée, ainsi qu’un phénomène de type scattering pour l’équation de Schrödinger sous-critique, en développant des estimations adéquates à partir de résultats récents sur les projecteurs spectraux, qui se substituent efficacement dans ce cadre aux estimations de Strichartz.